Régime des pensions métiers pénibles : les travailleurs méritent mieux !

12 juin 2018
Actualité

La FGTB veut que le gouvernement prévoie, comme promis, une compensation équitable pour les travailleurs qui connaissent des conditions de travail pénibles.

Depuis son entrée en fonction, la politique du gouvernement Michel en matière de pensions se caractérise par l’allongement des carrières. Un seul mot d’ordre sous ce Gouvernement : « Travailler plus pour gagner moins ! »

L’âge pour pouvoir partir à la pension a été porté à 67 ans. Les conditions d’âge pour la pension anticipée, le RCC (anciennement la prépension) et le crédit-temps ont également été revues à la hausse.

La FGTB continuera à s’opposer à ces mesures injustes. Le gouvernement répercute ainsi le coût du vieillissement sur les travailleurs. Le relèvement de l’âge de la pension ne tient aucunement compte de l’espérance de vie en bonne santé : une espérance de vie en bonne santé qui n’est même pas de 64 ans en moyenne et qui n’atteint même pas 55 ans pour les travailleurs peu qualifiés.

La FGTB exige, dans tous les cas, que ce gouvernement tienne sa promesse de prévoir une compensation pour les travailleurs occupés dans une fonction pénible.

La compensation pour le travail pénible que présente le gouvernement aujourd’hui est simplement inacceptable. Beaucoup de travailleurs occupés dans une fonction pénible raccourciront à peine la durée de leur carrière. Et s’ils obtiennent la chance de pouvoir partir plus tôt à la pension, ils toucheront une pension moindre, et ce pour le reste de leur vie.

Les exemples suivants parlent d’eux-mêmes :

  • Marie découpe des poulets dans une entreprise de transformation de la viande depuis ses 16 ans. A 60 ans, elle comptabilisera une carrière de 44 ans. Elle ne reçoit aucune compensation pour son travail pénible parce qu’elle répond déjà aux conditions pour la pension anticipée.
    Conséquence du Gouvernement Michel : les travailleurs/travailleuses qui ont commencé à travailler très tôt ne sont pas récompensé(e)s.
  • Jean a commencé à travailler en 1984 comme camionneur. Il avait 18 ans. En 2019, il doit renoncer à ce travail en raison de problèmes de santé persistants. Il trouve un autre emploi. Même si la profession de camionneur répond aux critères d’un métier pénible, les 35 années de carrière de Jean ne lui donneront pas accès au régime des métiers pénibles parce qu’il n’exerce plus cette profession au 31 décembre 2019. Et même si Jean changeait d’employeur début 2019, mais continuait à travailler comme camionneur, les 35 années de travail précédentes ne seraient pas non plus prises en compte.
    Conséquence du Gouvernement Michel : les travailleurs/travailleuses âgé(e)s – avec de nombreuses années de prestation avant 2020 – peuvent à peine partir plus tôt à la pension, même si ils/elles ont une carrière pénible derrière eux/elles.
  • Élise a commencé à travailler à temps partiel dans un call center en 2010. Elle est alors âgée de 21 ans. Son travail est très pénible : physiquement pénible en raison de l’environnement de travail, d’une organisation pénible du travail, en plus du stress et de la pénibilité émotionnelle ou mentale. Après 2020, elle est inactive pendant une période totale de 4 ans et 3 mois (maladie, aidant proche, congé pour soins palliatifs…) Elle peut partir à la pension anticipée en 2052. Elle aura alors 63 ans et pourra prouver une carrière de 42 ans. Si son travail est reconnu comme profession pénible sur la base de la charge physique, organisationnelle et émotionnelle, elle pourra donc partir, au maximum, 21 mois plus tôt (dans l’hypothèse où 10 années prestées avant 2020 sont valorisées). Si elle a droit à la pension minimum, elle recevra €1.081,64 par mois, soit €138,37 par mois en moins que la pension après une carrière complète de 45 ans (€1.220).
    Conséquence du Gouvernement Michel les travailleurs/travailleuses perdent une grande partie de leur maigre pension s’ils ou elles veulent arrêter plus tôt leur métier pénible. La perte de pension peut aller jusqu’à 250 euros par mois.
  • Tom est né le 1er janvier 1999 et commence à travailler le 1er juin 2020. De 2020 à 2035, il travaille comme soudeur de conteneur. Il passe ensuite à un travail plus léger qui n’est pas reconnu comme métier pénible. Tom peut partir à la pension anticipée à l’âge de 63,5 ans, avec 42 années de carrière. Si le métier de soudeur de conteneur est reconnu comme métier pénible sur la base d’un seul critère, il pourra partir 6 mois plus tôt à la pension, à savoir à son 63ème anniversaire. Si sa profession est reconnue sur la base de deux critères, Tom pourra partir 7 mois plus tôt à la pension. Enfin, si sa profession est reconnue sur la base de trois critères, il pourra partir 16 mois plus tôt à la pension, à l’âge de 62 ans. S’il utilise cette possibilité, il perdra 8% de sa pension.
    Conséquence du Gouvernement Michel : les travailleurs qui ont effectué un travail très pénible sont à peine récompensés pour leurs efforts dans la proposition gouvernementale. Dans de nombreux cas, ils ne pourront partir que quelques mois plus tôt à la pension (avec une perte de pension).
  • Paul est né le 1er octobre 1960. Il a commencé à travailler le 1er septembre 1980. La première date à laquelle il peut partir en pension est le 1er septembre 2023. Il peut alors prendre une pension anticipée à l'âge de 63 ans avec 42 ans de carrière. Si sa profession est reconnue comme pénible, les 40 années travaillées avant 2020 lui permettront de partir avec 6 mois d'avance maximum (en supposant que 10 ans soient pris en compte). Si sa profession est reconnue comme pénible sur la base de trois critères, il pourra prendre sa pension le 1er décembre 2022 au plus tôt.
    (1 critère : 01/03/2023 ; 2 critères : 01/11/2023 ; 3 critères 01/12/2022)

Revendications

La FGTB exige que le gouvernement revoie sa copie. Nous voulons dans tous les cas :

  • que la charge émotionnelle et psychosociale soit prise en compte à part entière ;
  • que le travail pénible soit toujours pris en compte, même s’il date d’avant 2020 ;
  • que ceux qui ont commencé (très tôt) à travailler soit également récompensé ;
  • que la décision d’arrêter à travailler plus tôt en raison de la pénibilité du travail ne soit pas sanctionnée par une perte de pension ;
  • que les périodes pendant lesquelles le contrat de travail a été suspendu (chômage temporaire, première année de maladie, congé de maternité, congé parental, congé de paternité…) soient prises en compte à part entière ;
  • que les régimes existants pour une sortie anticipée (RCC spécifique construction, travail de nuit, métiers lourds) et les emplois de fin de carrière soient maintenus en l’état.

La FGTB n’acceptera pas qu’un régime de pension aussi important soit mis en œuvre sans tenir compte de la voix des travailleurs alors qu’au bout du compte ce sont eux qui sont concernés. Nous avons le droit de nous exprimer car nous représentons plus de 70% des revenus de la sécurité sociale. Il s’agit de notre sécurité sociale, de nos pensions. Au besoin, nous mettrons le gouvernement et les employeurs - qui osent prétendre que la proposition du gouvernement est trop souple – devant leurs responsabilités.

La pénibilité, comment ça marche ?

La proposition du gouvernement part de quatre éléments qui peuvent être pris en considération pour une reconnaissance comme fonction pénible :

  • Conditions de travail pénibles
  • Organisation du travail pénible  
  • Pénibilité liée à des risques accrus en matière de sécurité
  • Pénibilité de nature mentale ou émotionnelle (uniquement en combinaison avec un autre critère!)

Si la fonction répond à ces critères, il en résulte un « gain de carrière » de 5% (1 critère), 10% (2 critères) ou 15% (3 ou 4 critères). Concrètement, cela signifie que la durée de carrière requise pour la pension anticipée est raccourcie de 5%, 10% ou 15%.

Le Gouvernement prévoit également un bonus pour mourir plus tôt. De quoi s’agit-il ?

Malgré le fait que l’on reconnaisse que le métier pénible a des conséquences néfastes sur la santé et sur l’espérance de vie, on peut choisir malgré tout de travailler plus longtemps. Cela engendrera un bonus de pension (allocation de pension supplémentaire). Autrement dit, le Gouvernement vous propose de partir plutôt à la pension en raison du caractère pénible de votre métier (en perdant sur votre pension) ou de négocier votre santé en acceptant de travailler plus longtemps pour obtenir un peu plus de pensions. Ce qu’on appelle un bonus pour mourir plus tôt !

Conditions actuelles pour accéder à la pension anticipées (à partir de 2019):

  • 63 ans, moyennant une carrière de 42 ans
  • 61 ans, moyennant une carrière de 43 ans
  • 60 ans, moyennant une carrière de 44 ans

En théorie, cela signifie qu’un travailleur qui a exercé pendant toute sa carrière, de façon ininterrompue, un travail reconnu comme physiquement pénible (1 critère), obtient après 40 ans le droit de partir à la pension anticipée à 63 ans (5% supplémentaires sur 40 ans équivalent à 2 ans, soit une carrière de 42 ans).

Soulignons qu’il s’agit ici en premier lieu du régime pour le secteur privé et qu’il s’agit encore actuellement d’une proposition gouvernementale qui doit être approuvée définitivement par le gouvernement d’abord et le parlement ensuite. Les syndicats ont émis un avis négatif au Comité de Gestion du Service fédéral des Pensions.  Le gouvernement a entre-temps également demandé un avis aux interlocuteurs sociaux au sein du Conseil National du Travail sur la concrétisation de sa proposition via l’élaboration d’une liste de fonctions. La FGTB continue, dans ce dossier, à défendre l’utilisation de critères objectifs et scientifiques.