Égalité, solidarité, dignité : la voie vers la justice sociale

29 avril 2019
Actualité

À la veille des élections du 26 mai, la FGTB et Solidaris ont adopté une déclaration commune visant à tracer les lignes indispensables afin d’éradiquer les inégalités sociales et de santé.

« La justice sociale est fondée sur l’égalité des droits pour tous les peuples et la possibilité pour tous les êtres humains sans discrimination de bénéficier du progrès économique et social partout dans le monde. Promouvoir la justice sociale ne consiste pas simplement à augmenter les revenus et à créer des emplois. C’est aussi une question de droits, de dignité et de liberté d’expression pour les travailleurs et les travailleuses, ainsi que d’autonomie économique, sociale et politique » (ONU, 2018).

Il y a près de 10 ans, les États (dont la Belgique), le patronat et les organisations syndicales se sont entendus sur ces principes ambitieux, à mettre au coeur de l’action politique moderne. Les moyens de les mettre en oeuvre sont connus : la lutte contre les inégalités au travers d’une juste redistribution des richesses.

Seulement voilà, en 10 ans ces objectifs vertueux et modernes qui faisaient consensus sont passés à la trappe. Plutôt que d’assister à une modération du néolibéralisme à l’origine de la crise financière et économique, on a assisté à son exacerbation. A coup de cures d’austérité, le néolibéralisme s’est attaqué au coeur du modèle social économique européen : la sécurité sociale. Les idéaux de justice sociale, de progrès, d’émancipation et d’égalité ont fait place à l’insécurité sociale, à la peur, au chacun pour soi et au populisme. De sorte que la situation sociale belge, loin de s’être améliorée, se détériore.

Tous les indicateurs sont au rouge !

Le taux de risque de pauvreté est passé de 14,7% en 2008 à 15,9% de la population en 2017 2. Près de 2,23 millions de Belges sont en situation de pauvreté. Cela signifie qu’ils ne peuvent se nourrir, se soigner, se loger, ni élever leurs enfants correctement. C’est au niveau de la famille (monoparentale en particulier), que le risque de pauvreté est le plus criant. Un peu plus de 4 familles monoparentales sur 10 risquent de tomber dans la pauvreté (41,4%). Et ce ratio s’élève à 8 familles sur 10 si le parent est sans emploi.

Selon le bilan de la Commission européenne, la Belgique est le pays ou l’inégalité d’accès aux soins entre les hauts et les bas revenus est la plus marquée. Alors qu’en 2011, 4,2% des plus faibles revenus (quintile le plus bas) indiquaient ne pas avoir accès aux soins nécessaires, ce chiffre s’élevait à 7,7 % en 2016 3. Selon la dernière enquête de Solidaris, 4 personnes sur 10 qui en avaient besoin, ont renoncé au moins à un soin pour des raisons financières en Wallonie et à Bruxelles. Les inégalités sociales en matière de report de soins se sont creusées depuis 2015. En particulier, pour une proportion de plus en plus importante de la classe moyenne.

Ces résultats sont à mettre en relation avec la récente étude du bureau fédéral du plan qui montre que le bien-être des personnes à revenu moyen a diminué en 2016 et 2017 et que cela s’explique surtout par la dégradation de leur santé.

Pour une grande réforme sociale

Face à cette situation, la FGTB et les mutualités socialistes exigent que le prochain Gouvernement en termine avec les vieilles recettes libérales austérité, pauvreté et inégalités qui ont fait preuve de toute leur inefficacité pour enfin se diriger vers la voie de la Justice Sociale. Veiller à rééquilibrer la balance en faveur des « oubliés », des citoyens que certains considèrent de« seconde zone », telle devra être la mission du prochain Gouvernement.

C’est pourquoi la FGTB et les mutuelles socialistes appellent à la mise sur pied d’un projet de société socialement plus juste qui devra reposer sur une triple réforme fiscale, sociale et économique.

1er pilier : pour la justice fiscale

Le fondement de la solidarité s’effectue par une juste redistribution des richesses au travers de mécanismes fiscaux et parafiscaux. Or, les politiques libérales visant à réduire les cotisations sociales conduisent à un définancement chronique de la sécurité sociale. Ce faisant, de plus en plus de personnes sont laissées pour compte. En outre, le système fiscal actuel est marqué par une profonde injustice. Pendant que les travailleurs et les personnes fragilisés contribuent à la collectivité d’autres, fortunés ou passés maîtres dans l’évasion ou la fraude fiscale, ne contribuent que très peu voire… pas du tout !

Pour les mutualités socialistes et la FGTB, il est grand temps de mettre en place une grande réforme fiscale qui garantisse que les épaules les plus solides (grosses fortunes et grandes entreprises) contribuent justement à la collectivité. Nous sommes convaincus que réparer la machine fiscale est la base d’une lutte efficace contre la montée des inégalités.

Pour ce faire, nous proposons :

  • La globalisation de l’impôt : chaque euro, d’où qu’il provienne (du travail, du capital, des revenus locatifs), doit être imposé de la même manière.
  • Un halte-là aux cadeaux fiscaux et aux réductions de cotisations sociales inconsidérées et sans contrepartie de création d’emplois

2ème pilier : pour un pouvoir d’achat retrouvé

-2,3%. C’est la rémunération réelle que les travailleurs belges ont perdue en à peine quelques années. Seuls quelques pays en Europe font pire que la Belgique. C’est dire à quel point la machine économique (visant à créer de la richesse) et la machine fiscale (visant à redistribuer les richesses) sont grippées. Pour les jeunes et les générations futures, l’avenir s’obscurcit et la promesse de lendemains meilleurs que leurs aînés ne peut plus être tenue. Pour les travailleurs actifs, le projet libéral vise à accroître la flexibilité et à travailler toujours plus pour quelques miettes supplémentaires. Pour nos pensionnés, la rupture du contrat social est totale, tant les projets libéraux se sont bornés à faire de ce poste de la sécurité sociale un poste d’économie.

Pour la FGTB et les mutuelles socialistes, il est grand temps de rompre avec cette logique aux conséquences économiques et sociales désastreuses.

Nous exigeons que le prochain Gouvernement adopte les mesures suivantes :

  • La garantie d’augmentations salariales décentes
  • Un salaire minimum de 14€ brut/heure (2.300€/mois)
  • Le relèvement de la pension minimum à 1.500 € nets
  • Refinancer l’hôpital et les actes médicaux sur une base objective et transparente pour rendre superflus les suppléments d’honoraires à l’hôpital

3ème pilier : pour éradiquer les inégalités sociales et de santé

Aujourd’hui, les personnes les plus fragilisées sont à bout. Les allocations sociales minimales, censées être l’aide ultime de la collectivité, sont largement trop faibles. 90 % des allocations sociales minimales sont ainsi situées en dessous du seuil de pauvreté. Au lieu de sortir les gens de la pauvreté et de la précarité, les politiques libérales et les cures d’austérité qui nous ont été imposées conduisent à accroître le gouffre entre les quelques-uns privilégiés et la majorité des citoyens. De sorte que les inégalités sociales augmentent et se reproduisent En outre, l’accroissement des inégalités sociales conduit également à l’accroissement des inégalités de santé.

Ainsi, d’après la récente étude de Solidaris le taux de mortalité avant l’âge de 65 ans est 2 fois plus élevé parmi les personnes issues des milieux les plus précaires comparativement aux milieux les plus aisés. Leur état de santé est sensiblement plus dégradé avec 3,2 fois plus de personnes en situation de handicap et une prévalence du diabète 2 fois supérieure.

Étant donné que la santé n’est pas un luxe, la FGTB et les mutuelles socialistes plaident pour que l’on garantisse que toutes et tous puissent se soigner et vivre dignement. Car il est inacceptable que les inégalités sociales se doublent d’inégalité de santé.

C’est pourquoi nous plaidons pour :

  • Le relèvement des allocations sociales minimales au-dessus du seuil de pauvret
  • Un renforcement du financement de la sécurité sociale
  • Lever tous les obstacles aux soins de bases en première ligne
  • Une politique efficace de prévention des risques en entreprise afin d’éviter que le travail ne rende malade

Enfin, ces réformes devront être guidées par trois valeurs cardinales qui nous unissent et qui devraient fonder les bases d’une société socialement juste.

L’égalité, la solidarité et la dignité !